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28 décembre 2011 3 28 /12 /décembre /2011 11:13

Confiée à Seth Greenland, la radioscopie de la société américaine est cruelle.

 

Une chronique de Frédérique Bréhaut

 

Greenland

Seth Greenland n’a rien perdu de son mordant pour peindre ses contemporains.


Palm Springs, la Californie côté désert. Viré de la police parce qu’il aimait trop les chiens, Jimmy Duke cherche l’accomplissement de son être par les voies du bouddhisme dispensées par un coach en ligne. Or le chemin de la sagesse est escarpé pour Jimmy, encadré par deux frères remuants.

 

L’aîné, Duke vise une réélection de représentant au Congrès et soigne sa campagne électorale face à son adversaire, une brune pulpeuse version californienne de Sarah Palin. Quant à Dale, le cadet tétraplégique, à peine sorti de prison par son frère député (la rédemption, c’est toujours bon pour l’image), il mijote déjà un coup foireux.

 

Un tableau peint à l’acide

 

Depuis son mobil-home déglingué, Jimmy pressent l’accumulation des mauvaises ondes. Son jugement s’avère d’autant plus perspicace que la distribution s’étoffe autour de l’épouse frustrée du politicien et de leur fille explosive, d’une bimbo trop audacieuse et d’un flic volage qui aime deux choses par-dessus tout, tromper sa femme et son molosse baptisé du doux nom de Fléau.

 

Quelques gros bras, un directeur de campagne plus vrai que nature et un corbeau dont le blog balance des rumeurs salaces sur les deux adversaires politiques complètent un tableau peint à l’acide.

 

Cynique à souhait, Seth Greenland pourrait être le fils caché de Jean-Pierre Mocky et de Quentin Tarentino. Du premier, il tient l’art de décaper le vernis, du second celui de pulvériser les bons sentiments à un rythme d’enfer.

 

On rit aux éclats à la lecture de la charge féroce contre une Amérique droguée à Dieu et au sentiment de culpabilité. Parmi les ambitions et les petites mesquineries qui fermentent au soleil de Californie, l’écrivain américain jubile et son lecteur est à l’unisson. Certes, les personnages ne sortent pas des cercles les plus vertueux. Mais humains, si humains, leurs scrupules fondent à la perspective d’un joli coup, quitte à ce que leur karma se froisse au passage.

 

Chez Greenland auquel on doit deux précédents romans tout aussi corrosifs, la radioscopie de la société américaine est cruelle, l’humour désopilant.

 

« Un bouddhiste en colère » de Seth Greenland. Traduit de l’anglais par Jean Esh. Liana Levi. 415 pages. 22 €.

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