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17 décembre 2011 6 17 /12 /décembre /2011 16:49

En publiant « Cadix, ou la diagonale du fou », Arturo Perez-Reverte renoue avec le roman d’aventure de façon éclatante.

 

Une chronique de Frédérique Bréhaut

 

Perez-Reverte---C.-Rubio-01.jpg@ C. Rubio


Voici une vingtaine d’années, Arturo Perez-Reverte adressait avec « Club Dumas » un clin d’œil au maître français du roman historique. Plus que jamais cette filiation s’épanouit au fil des pages opulentes de "Cadix ou la diagonale du fou". Dans cette façon d’empoigner le récit, de tracer les lignes de destins singuliers au creux d’une vaste fresque imprégnée d’odeurs de poudre, de sang, d’épices et d’embruns, l’Espagnol renoue avec l’imaginaire tumultueux qui nous enchante.

 

Perez-Reverte met le cap sur Cadix assiégée pas les troupes napoléoniennes. Nous sommes en 1811. Dans la ville-navire poncée par les flots et les vents, la population résiste crânement au siège qui s’étire depuis des mois. Il est vrai que les boulets explosent rarement et que grâce aux trafics en tous genres, les Gaditans vaquent à leurs occupations. Pourtant la nuit, un homme profite de la parenthèse guerrière pour zigouiller avec une cruauté raffinée de très jeunes filles.

 

La belle de Cadix


Détail piquant, ces assassinats sont commis à l’endroit exact où tombent les bombes. Commissaire de la trempe d’un Javert, Tizon traque le coupable entre références à Sophocle et diagonales de parties d’échecs qui se confondent avec les orbes des boulets français.

 

Ignorante des crimes nocturnes, Cadix bruit, vit, frémit. Une séduisante fille d’armateur confie ses intérêts commerciaux à un corsaire mélancolique, un artilleur français épris de trajectoires parfaites cherche le secret d’un bombardement réussi, un taxidermiste misanthrope gagné aux idées de Rousseau élève des pigeons voyageurs pendant que les assiégeants mènent une vie plus rude que celle des assiégés. Les lois de la guerre sont injustes et l’écrivain espagnol en parle si bien.

 

Dans une ville effervescente et inquiétante, Perez-Reverte tient la bride au récit picaresque. Rien ne manque au plaisir, ni les abordages de brigantins lestes à la manœuvre, ni les palpitations de Gaditanes de bonne famille qui chassent leurs émois d’un coup d’éventail. Ces 750 pages superbement traduites par François Maspero emportent vers des carnavals multicolores et des batailles navales meurtrières sans perdre de vue une énigme policière haletante.

 

« Cadix, ou la diagonale du fou » d’Arturo Perez-Reverte. Traduit de l’espagnol par François Maspero. Seuil. 765 pages. 23 €.

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